Pardonner - délier des nœud

Les conflits au sein d’une Église, sont comme les nœuds. On ne sait pas qui a commencé, on ne connait pas tous les tenants et aboutissants. Dès lors, que faire ?

SOMMAIRE

  1. Lecture de l’Évangile
  2. Impulsion
  3. Prière

LECTURE DE L’ÉVANGILE

Matthieu 18.15-35

»Si ton frère a péché [contre toi], va et reprends-le seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère.
 
Mais s’il ne t’écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l’affaire se règle sur la déclaration de deux ou de trois témoins.
 
S’il refuse de les écouter, dis-le à l’Église; et s’il refuse aussi d’écouter l’Église, qu’il soit à tes yeux comme le membre d’un autre peuple et le collecteur d’impôts.
 
Je vous le dis en vérité, tout ce que vous lierez sur la terre aura été lié au ciel et tout ce que vous délierez sur la terre aura été délié au ciel.
»Je vous dis encore que si deux d’entre vous s’accordent sur la terre pour demander quoi que ce soit, cela leur sera accordé par mon Père céleste. 20En effet, là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux.»
 
Alors Pierre s’approcha de Jésus et lui dit: «Seigneur, combien de fois pardonnerai-je à mon frère, lorsqu’il péchera contre moi? Est-ce que ce sera jusqu’à 7 fois?» Jésus lui dit: «Je ne te dis pas jusqu’à 7 fois, mais jusqu’à 70 fois 7 fois.
 
»C’est pourquoi, le royaume des cieux ressemble à un roi qui voulut régler ses comptes avec ses serviteurs. Quand il se mit à l’œuvre, on lui en amena un qui devait 10’000 sacs d’argent. Comme il n’avait pas de quoi payer, son maître ordonna de le vendre, lui, sa femme, ses enfants et tout ce qu’il avait, afin d’être remboursé de cette dette. Le serviteur se jeta par terre et se prosterna devant lui en disant: ‘[Seigneur,] prends patience envers moi et je te paierai tout.’ Rempli de compassion, le maître de ce serviteur le laissa partir et lui remit la dette.
Une fois sorti, ce serviteur rencontra un de ses compagnons qui lui devait 100 pièces d’argent. Il l’attrapa à la gorge et se mit à l’étrangler en disant: ‘Paie ce que tu me dois.’ Son compagnon tomba [à ses pieds] en le suppliant: ‘Prends patience envers moi et je te paierai.’ Mais l’autre ne voulut pas et alla le faire jeter en prison jusqu’à ce qu’il ait payé ce qu’il devait. A la vue de ce qui était arrivé, ses compagnons furent profondément attristés, et ils allèrent raconter à leur maître tout ce qui s’était passé.
Alors le maître fit appeler ce serviteur et lui dit: ‘Méchant serviteur, je t’avais remis en entier ta dette parce que tu m’en avais supplié. Ne devais-tu pas, toi aussi, avoir pitié de ton compagnon comme j’ai eu pitié de toi?’ Et son maître, irrité, le livra aux bourreaux jusqu’à ce qu’il ait payé tout ce qu’il devait.
 
C’est ainsi que mon Père céleste vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère de tout son cœur.»

IMPULSION

L’ÉGLISE FACE AUX NOEUDS RELATIONNELS

Faut-il pardonner aveuglément ?

Imaginez un gros nœud. Tout est emmêlé et même les extrémités ne sont pas distinguables. Par où le nœud commence-t-il ? Qui tient le bon bout ? Comment est-ce que cela va se terminer ?

Les conflits au sein d’un groupe, d’une communauté, d’une Église, sont de même acabit. On ne sait pas qui a commencé, on ne connait pas tous les tenants et aboutissants. Nous sommes face à des nœuds relationnels difficilement compréhensibles dont on a peine à imaginer le dénouement.

Au moment de la rédaction de l’Évangile de Matthieu, l’auteur devait lui aussi être confronté à des tensions internes aux communautés chrétiennes. Et l’indice qui me le fait dire est que par deux fois, l’auteur met dans la bouche de Jésus le mot église – ekklesia (v.17)… alors même que l’Église n’était pas encore une réalité du temps de Jésus.

Quand les croyants s’emmèlent : Trouver un accord

Si je joue avec l’image du nœud, c’est que l’éthymologie du mot pardonner provient du terme aphiemi qui signifie délier. Le pardon, au sein  d’un groupe, consiste donc à s’engager pour délier un nœud, une situation.

Revenons à notre récit : Depuis de longues minutes, les disciples suivent une formation sur la dynamique de groupe au sein de l’Église et plus précisément sur la gestion de crise. Il faut dire que lorsqu’il y a communauté les nœuds sont inévitables. Les membres se blessent entre eux, souffrent, se sentent incompris, victimes, exclus,…

Mais ces tensions au sein d’un groupe ne sont pas viables à long terme. Voilà pourquoi, Jésus encourage ses disciples (et nous également par la même occasion) à suivre un chemin (v.15-17) en vue de retrouver un vivre ensemble de qualité.

Les 4 étapes suggérées sont :

  1. En parler entre quatre yeux. Discuter avec la personne concernée du nœud relationnel qui est apparu.
  2. Organiser une médiation. Prendre des témoins pour s’assurer que chaque protagoniste est véritablement entendu.
  3. Demander à la communauté de se prononcer. Si le conflit venait à perdurer, c’est devant l’ensemble de la communauté que les explications doivent avoir lieu. Il est question pour la communauté de se prononcer sur ce qu’elle valide ou pas dans sa vie de groupe. En bref, de garantir et de sécuriser le cadre du vivre ensemble.
  4. Accepter que les chemins se séparent. Si aucune solution venait à être trouvée, la/les personne.s qui ne font pas preuve de volonté à défaire le nœud, sont priées de se retirer du groupe.

Viser une Église sans noeuds ?

tout cela est bien beau… mais quand il y a de multiples récidives. Quand on doit régulièrement remettre l’ouvrage sur le métier. Jusqu’à quand peut-on éterniser ces démarches de pacification ?

Ne devrions-nous pas faire preuve d’autorité et exclure tous les fauteurs de trouble ? Et même si on laissait une deuxième chance à un membre, ne devrions-nous pas ensuite lui demander de s’en aller ? Reprenons les interpellations des disciples :

  • Jusqu’à quand vais-je le/la supporter ?
  • Combien de fois dois-je pardonner à mon frère ?

À cette question Jésus répond par une pirouette. Pour lui, la question n’est pas de savoir combien de fois on va se mettre en action pour délier un différent. La question centrale est celle de l’état d’esprit.

Veiller à son état d’esprit

C’est à l’aide d’une petite histoire que la réponse apparait. Un roi gracie une personne qui lui est redevable alors même qu’il n’a rien demandé ! Et cette même personne n’est pas capable de gracier une tierce personne qui lui est bien moins redevable. Cela offusque son entourage qui le dénonce auprès du roi. Dans ces deux situations, la différence réside dans le fait que quand il y a un nœud, une redevabilité, il faut être deux pour régler le problème. Le premier homme regarde à son intérêt et à la fois quand il est gracié et quand il ne gracie pas. Sa petite personne et son bien-être sont au coeur de ses actions. Ce n’est pas cela un bon état d’esprit.

On ne vient pas régler un nœud uniquement par intérêt personnel ! On vient le régler pour que toute les parties soient déliées de la problématique. On agit pour un retour à de saines relations. Dans le cas contraire, la situation ne ferra qu’empirer et le noeud initial sera source de beaucoup de tourments, de préoccupations.

L’état d’esprit est donc de ne pas penser à soi et uniquement à son propre bénéfice, mais à libérer également l’autre de son lien à ce nœud néfaste. Pour que la relation perdure. Pour que chacun soit libéré de son noeud… et pour que la corde de la vie de chaque protagoniste soit complètement dénouée.

Un des travers de l’Église a été de vouloir cacher les problèmes au grand damne des victimes. Souvent, de manière unilatérale et douteuse, le système à caché, exclu, minimisé et évité de régler des noeuds relationnels pour montrer patte blanche et sauver les apparences. Malheureusement, cette stratégie efficace à court terme pour sauver les apparences se révèle destructrice pour les victimes, conforte les bourreaux et crée une véritable bombe à retardement.

Chaque corde prise dans le noeud doit être prise au sérieux.

Conclusion

Lorsque l’on aborde la question du pardon, on prend le risque de réveiller de profondes blessures. Il y a tellement à dire sur cette problématique et les angles d’approches sont très variés. Nous pourrions aborder des questions en lien avec le lâcher-prise, le non-pardon, la gestion des traumas et j’en passe. Une chose est certaine, quelle que soit la situation, le pardon ne consiste pas à justifier l’autre et à cautionner ses actes et ses paroles destructrices. Parfois, lorsque les noeuds sont trop profond, il faut couper la corde relationnelle pour sa propre sécurité et pour ne pas être envahi par la situation ou la personne dysfonctionnelle. En bref, éviter l’effet boule de neige. Malheureusement, il arrive aussi que la victime doive se retirer du groupe pour sa propre sécurité et parce que le groupe n’est pas apte à lui garantir une place saine et sécure.

Mais lorsque les membres d’un groupe ambitionnent le vivre-ensemble, ils doivent être prêts à s’investir pour dépasser les points de frictions inévitables. Il y a pour cela trois étapes à considérer pour régler une problématique au sein du groupe : le face à face, la médiation, la confrontation au cadre institutionnel.

PRIÈRE

Seigneur,

Face aux noeuds relationnels et aux conflits,

quand tout est emmêlé, confus,

que devons-nos faire ?

Quand la récidive persiste,

Quand nous doutons, nous nous impatientons

Jusqu’à quel point devons-nous faire preuve de pardon ?

Seigneur,

Aide-nous à veiller à notre état d’esprit,

À agir non pour notre intérêt, mais pour la liberté,

Pour que les noeuds se dénouent,

et pour que l’amour soit manifeste,

dans chaque relation

Seigneur

Que notre coeur soit tourné vers l’autre, avec humilité,

Et que la réconciliation soit notre seule quête,

Délier les noeuds des relations blessées

Pour une Église qui délie et qui relie.

Amen.

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Philippe Cavin - à propos

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